Chloé Saada Jaoui, prêtresse du cupcake

Épicurienne déclassée, elle fait de la gourmandise le plus mignon des péchés. Dans son odyssée gastronomique, Chloé, maîtresse et juge du bon goût, a fait d’une passion pour la cuisine un domaine où l’art triomphe à mi-chemin entre création culinaire et œuvre éphémère.

Chef émérite hors catégorie, elle sollicite alors tous les sens, de la vue au toucher, en passant avec évidence par le goût, s’imposant comme la charmante suborneuse des fourneaux. Photographe, organisatrice d’événements et écrivaine, elle porte une toque unique. Une toque artistique. Portrait d’une magicienne des saveurs, dont la plume s’affûte aussi bien que le couteau.

Acte I – Genèse : odyssée du bon goût

Il n’est pas inapproprié de parler de périple dans l’écriture de son destin atypique. 1981 : Chloé nait à Paris, y grandit et s’y épanouie entre le 9ème et le 10ème arrondissement. D’un tempérament créatif, elle sillonne un chemin où l’art est maître. Elle entre alors dans l’école de design de Penninghen Paris. Cinq ans plus tard et diplômée, elle débute sa carrière. Photographe de mode et directrice artistique, elle se fait un nom dans un appétant univers fait de paillettes et d’apparences gracieuses. Ce n’est pourtant pas ce type d’enrobage qu’elle aime napper. Aux tréfonds de ses aspirations, somnolent des idées gourmandes. Elle rêve alors de couleurs, de textures, de glaçages.

Quoi de mieux que le cupcake pour représenter un art culinaire nouveau ? Désormais en vogue, cette pâtisserie d’origine américaine était encore méconnue en France. Chloé devient alors une révélation dans ce microcosme gastronomique et démocratise ce mouvement. Elle édite en 2012 un bouquin best seller, très simplement nommé Les Cupcakes de Chloé et recettes gourmandes. S’en suit une ribambelle mimétique dans les boulangeries qui en fait une véritable mode. Son passé ne s’éloigne tout compte fait pas de son présent puisque ses idées gravissent le sommet des podiums. Elle comprend alors qu’elle a un don. Celui de coupler plusieurs talents au service de sa passion : la cuisine, dont la pâtisserie est son péché mignon.

Elle fonde alors un service traiteur haute gamme et continue de travailler dans le monde de la mode. Cette fois-ci, elle fait de ses créations de véritables sculptures alimentaires, alliant le bon au beau. Son ascension est telle qu’elle possède sa chronique chez Cuisine TV. Jury de l’émission Le Meilleur Pâtissier diffusé sur M6 en 2012, elle est aussi sollicitée pour son point de vue acerbe lors de nombreux concours, dont celui du Salon du Chocolat. La voilà devenue un véritable mentor dans cet univers qui ne lui était pourtant pas prédestiné.

Attristée par les attentats de Paris de novembre 2015, elle se devait d’exprimer sa liberté à elle. Elle pétrie alors une pâte littéraire et publie Salam Shalom, pour affirmer une unité même au travers de recettes de cuisine. Ce projet l’amène à interviewer un grand nombre de religieux monothéistes et de chefs de toutes origines pour proposer une grande diversité aux lecteurs désireux de concocter un bouillon de culture.

Sans cesse dans le renouveau, elle sort le 25 octobre 2017 un ouvrage qu’elle nomme Paris Tel Aviv. Il conte l’histoire d’un périple culinaire dans sa ville de coeur autour de 30 chefs israéliens dont les personnalités variées et atypiques mettent en lumière la beauté d’un pays pris entre les feux des conflits de guerre. On y découvre avant tout une ouverture d’esprit dépassant les frontières.

Acte II – Inspirations

Plus qu’une inspiration ou un simple projet, la maternité guide sa vie riche de quêtes et de conquêtes. Maman de deux petits bouts de choux, elle voit ses progénitures comme sa véritable victoire. La famille reste l’un de ses grands modèles. Si bien, qu’elle ne définirait pas mieux la Parisienne par excellence qu’à travers sa propre mère dont chaque recoin de la Capitale figure sans son esprit comme une carte géographique mémorielle, bien plus performante qu’un GPS dernier cri. Elle voit en celle qui lui a donné la vie il y a 40 ans l’image d’une dame classieuse qui passe son temps à refaire le monde avec ses copines au Café de Flore.

Quand elle ne fait pas frétiller ses papilles, elle abreuve son esprit d’amour parce qu’« il en faut peut pour être heureux », credo optimiste la définissant parfaitement. Le tumulte de la journée passé et les enfants couchés, elle ne délaisse personne et en profite bien souvent pour appeler ses amis à l’autre bout de la Terre, de New York à Miami. Le décalage horaire devient alors idéal.

Ses habitudes matinales ? Une tartine de tomates agrémentée de crème de sésame sauce Tahini, préparation orientale faisant un fier clin d’oeil à ses origines tunisiennes. Addict à la cuisine du soleil, elle voue une véritable passion pour le couscous, le houmous ou encore les cornes de gazelle. Mais son réel péché mignon reste le Pkaila, un confit à base d’épinard et d’haricot issu d’une coutume culinaire judéo-tunisienne très peu connue. Sur son chemin, elle parsème de beaux projets, mais impossible d’avancer sans de dignes souliers. Chloé l’avoue : elle n’est pas seulement accro à la bonne bouffe mais aussi aux chaussures. « Pendant longtemps, j’ai cru que j’étais atteinte du syndrome de Cendrillon avec une collection de plus de de 80 paires mais… depuis j’ai trouvé l’amour et je continue d’en acheter ». Cette petite pointe d’humour qui lui va si bien fait d’elle une femme généreuse.

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